Sofia Amara, réalisatrice de "Syrie, à l’épreuve du pouvoir": "Le président a un parcours chaotique, aujourd’hui, il s’est syrianisé et déradicalisé"
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La journaliste Sofia Amara a été la première journaliste occidentale à se rendre en Syrie, en 2011, pour couvrir les répressions menées par Bachar al-Assad et son régime contre les manifestations pour la démocratie. Après la chute du dictateur le 8 décembre 2024, elle est retournée en Syrie. Ce qui l'a le plus marqué est de voir le sourire et la joie sur les visages des Syriens. "C'est très frustrant, quand vous couvrez une guerre, de rapporter les souffrances d'une population pendant tant d'années et de voir que cela ne change rien", dit-elle.
Elle signe le documentaire Syrie, à l'épreuve du pouvoir diffusé sur Arte le 22 avril à 22h30 et sur la plateforme arte.tv, qui s'ouvre donc sur des scènes de liesse, mais très vite, elle s'intéresse au parcours de chaotique du nouveau président, Ahmed al-Charaa. Il était auparavant jihadiste et connu sous un autre nom, Abou Mohammed al-Joulani. "En fait, il est revenu à ce qui aurait dû être sa personnalité, puisqu'il est né dans une famille très modérée, avec un père plutôt à gauche, explique Sofia Amara. L'Intifada palestinienne, le 11-Septembre et l'invasion de l'Irak par les Américains l'ont poussé dans les bras du jihad en Irak. Il a clairement expliqué dans une interview en 2015 que son but ultime était de créer un État islamique et il a ensuite renié la nébuleuse terroriste, donc, vous voyez que c'est un parcours assez chaotique, mais aujourd'hui, il s'est syrianisé et déradicalisé."
Le point de vue de la population
Dans son documentaire, Sofia Amara montre aussi la population syrienne à travers une femme, Maram, à la recherche de son frère, qui fait partie des 150 000 disparus. "Lorsque la Syrie a été libérée du joug des Assad, tout le monde attendait à ce qu'il y ait des dizaines de milliers de prisonniers, qui soient libérés. Quand les familles sont arrivées aux portes des prisons, personne n'en sortait", raconte-t-elle. Elle explique qu'ils étaient nombreux à se demander s'il n'y avait pas des prisons secrètes, où avaient été emmenés les prisonniers. "Il y a même des familles qui ont demandé au nouveau président de demander à Bachar al-Assad les clés ou les cartes des prisons secrètes".
Comme de nombreux Syriens et Syriennes, Maram est dans le déni parce qu'elle ne voit pas l'intérêt de tuer 150 000 personnes. "Ce qu'elle ne veut pas entendre, c'est que ces prisonniers sont morts il y a longtemps, dit Sofia Amara. Sauf que des gens se sont endettés pour pouvoir simplement obtenir des informations sur leurs enfants disparus et raflés par la police d'Assad. Donc, l'intérêt était de faire croire aux familles qu'ils étaient vivants pour continuer à leur soutirer de l'argent."
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