Reportage "Les Russes font semblant de vouloir la paix, il n'y a rien derrière" : à Kiev, la trêve annoncée par Vladimir Poutine accueillie avec scepticisme

Volodymyr Zelensky affirme que l'armée ukrainienne respectera le cessez-le-feu de son homologue russe et propose de la prolonger d'un mois pour tester "les véritables intentions de la Russie".
Article rédigé par franceinfo - Stanislas Poyet
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des piétons dans une rue de Kiev, en Ukraine, le 4 avril 2025. (SERGEY DOLZHENKO / EPA)
Des piétons dans une rue de Kiev, en Ukraine, le 4 avril 2025. (SERGEY DOLZHENKO / EPA)

À l’occasion de Pâques, Vladimir Poutine a ordonné, samedi 19 avril, un cessez-le-feu de 30 heures en Ukraine. Une annonce accueillie avec beaucoup de détachement et de scepticisme, samedi, dans les rues de Kiev. Sur une terrasse animée d'un café du quartier de Podil, Konstantin, 29 ans, suit les dernières informations sur son téléphone. "Nous ne pouvons absolument pas faire confiance aux Russes, l’histoire récente le montre. En 2022, en 2023, tous les cessez-le-feu ont échoué", souligne-t-il. Volodymyr Zelensky a annoncé que son pays respecterait la trêve, tout en accusant la Russie de continuer ses attaques.

Comme Konstantin, Kolya, 26 ans, reste très prudent : "Je suis absolument certain que cette déclaration est fausse et qu’il n’y a rien derrière. En réalité, nous avons déjà vu des dizaines de cessez-le-feu et chacun s’est terminé de la même manière." Avec eux, Ivan, un jeune soldat en permission et tout juste revenu du Donbas, exprime les mêmes doutes et partage son expérience des années passées. "Les Russes font semblant de vouloir la paix, uniquement pour faire croire que ce sont les Ukrainiens qui ne la veulent pas", assure le militaire. "En général, cela signifie qu’elle prépare quelque chose de mauvais", poursuit-il.

"À chaque fois, cela a mené à des manœuvres cachées pour frapper les positions ukrainiennes au moment où on s’y attendait le moins."

Ivan, soldat ukrainien

à franceinfo

Autour des tables tirées sur les trottoirs pour profiter de la douceur du soir, les conversations portent sur autre chose. "La journée à Kyiv est comme toutes les autres", souligne Mykola, jeune juriste. "Quand les gens lisent les nouvelles, leur plus grande émotion, c’est un petit sourire ironique, parce que tout le monde sait que cela ne veut rien dire et tout le monde sait comment ça va se terminer", explique-t-il en haussant les épaules. Une alarme aérienne retentit.  Personne n'y prête attention. Tous disent espérer une fin prochaine de la guerre, mais à Kiev, plus personne ne croit encore aux promesses de Vladimir Poutine.

Prolonger la trêve pour 30 jours

Voldymyr Zelensky a proposé de prolonger la trêve "au-delà du jour de Pâques, le 20 avril". "C'est ce qui révélera les véritables intentions de la Russie, car trente heures suffisent pour faire les gros titres, mais pas pour instaurer de véritables mesures de confiance. Trente jours pourraient donner une chance à la paix", affirme le président ukrainien, qui rappelle que la Russie est restée silencieuse pendant 39 jours face à une proposition américaine de trêve d’un mois.

Malgré cette proposition, la méfiance reste forte chez les Ukrainiens. "Ce genre de déclaration de cessez-le-feu n’est rien d’autre qu’une provocation. Nous avons eu des dizaines de cessez-le-feu de toutes sortes avec la Russie, et chaque fois, ils ont été violés", rappelle Olexandr Merejko, député ukrainien et président de la commission des Affaires étrangères, qui a participé aux négociations avec la Russie en 2014 et 2015. "Nous devons rester en alerte maximale", affirme l'élu. Dans la nuit de vendredi à samedi, "environ 100 drones et missiles balistiques ont visé des villes comme Kharkiv, faisant des dizaines de blessés", explique-t-il.

Sur le terrain, les frappes russes ont continué après le cessez-le-feu, affirme l'état-major ukrainien. "Les combats se poursuivent et les attaques russes continuent", déclare, samedi soir, le chef d'état-major de l'armée ukrainienne. "Dans certaines zones de la ligne de front, l'artillerie russe continue d'être entendue, malgré la promesse de silence du dirigeant russe. Des drones russes sont utilisés", détaille-t-il.

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