Reportage
"La mortalité a drastiquement baissé" : au Cameroun, le succès des campagnes de vaccination contre le paludisme

Le Cameroun est le premier pays d'Afrique à avoir débuté la vaccination des bébés en routine contre le paludisme, en 2024. L'année précédente, 11 000 personnes y étaient décédées de la maladie. Les premiers résultats de cette campagne de vaccination semblent positifs.
Article rédigé par Solenne Le Hen
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Une séance de vaccination des bébés à Wouyang, dans le nord du Cameroun. Mars 2025 (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Une séance de vaccination des bébés à Wouyang, dans le nord du Cameroun. Mars 2025 (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Dans le village de Wouyang, au Cameroun, les séances de vaccination sont régulières. Dehors, à l'ombre, alors que le thermomètre affiche plus de 40 degrés, plusieurs dizaines de mères sont venues faire vacciner leur bébé. "Tout ça prévient beaucoup plus le paludisme. Avec les doses, mon enfant n'a jamais attrapé le paludisme pour l'instant", assure Saratou, sa petite fille sur les genoux. Elle vient pour la troisième dose de vaccin.

Ils sont désormais 19 pays d'Afrique à vacciner les bébés en routine contre le paludisme, l'Ouganda étant le dernier en date. Cette vaccination qualifiée d'historique par l'Organisation mondiale de la santé a débuté à grande échelle il y a un an. Il existe désormais deux vaccins contre cette maladie qui, il y a encore trois ans, a tué 600 000 personnes dans le monde, en majorité des enfants de moins de 5 ans.

Parasite transmis par le moustique, le paludisme est au Cameroun une maladie redoutée des parents. "Tout le monde connaît les problèmes de palu dans le village. Il y a des cas graves. Les enfants convulsent, ont de la fièvre, avec parfois 39 à 40 degrés", explique Amadou Mana, agent de santé communautaire à Wouyang.

Rendre accessibles les soins

L'accès aux soins est difficile ici, car le premier centre de santé se trouve à huit kilomètres, accessible uniquement par une piste de sable. "Nous sommes un peu reculés des centres de santé et parfois, en menant l'enfant à l'hôpital, il décède en route", raconte l'agent de santé.

Pour ces raisons, la population est demandeuse de ces premiers vaccins contre le paludisme, explique Linda Maiwanso, responsable régionale vaccination à l'Unicef (les Nations unies gèrent cette vaccination avec le gouvernement camerounais).

"Le paludisme est la maladie la plus connue tueuse des enfants. Alors ces vaccins contre le paludisme, c'est de l'espoir".

Linda Maiwanso, responsable régionale vaccination à l'Unicef

à franceinfo

Pour l'instant, la campagne de vaccination est un succès, selon le gouvernement camerounais. Dans ce district de la région du Sahel, dans l'extrême-nord du pays, 70% des bébés ont reçu une première dose de vaccin contre le paludisme en 2024. "L'objectif, c'était 40 %. Donc, nous sommes allés au-delà des objectifs. Cla signifie que le message est passé tout doucement et que l'adhésion est en train de grimper. Au fur et à mesure que le temps passe, ça monte", détaille le Dr Alhadji Adam Yaya, représentant régional du ministère de la Santé.

Cette adhésion augmente alors que la vaccination reste contraignante, puisqu'elle suppose d'étaler quatre doses de vaccin sur un an et demi, entre les 6 lois et les 24 mois de l'enfant. L'enjeu principal est que ce nouveau calendrier vaccinal entre dans les habitudes des parents.

Dans ce district, 70% des bébés ont reçu une première dose de vaccin contre le paludisme en 2024. (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Dans ce district, 70% des bébés ont reçu une première dose de vaccin contre le paludisme en 2024. (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Zéro décès d'enfant l'an dernier

En 2024, plus de 3 000 bébés ont été vaccinés dans ce district, soit une majorité. Et les autorités de santé y notent déjà des premiers résultats, se félicite le Dr Abdoul Nasser, chef du district de Santé.

"En 2024, nous avons eu zéro décès d'enfants de moins de 5 ans lié au paludisme grave dans l'ensemble du district. En 2023, nous avions eu huit décès, et en 2022 douze décès d'enfants. Nous pouvons dire avec objectivité que la mortalité a vraiment drastiquement baissé. Nous saluons vraiment l'introduction de ces vaccins et leur effet dans notre communauté". Dr Abdoul Nasser, chef du district de santé à franceinfo

Moins de décès, mais aussi moins de formes graves, observent les autorités locales de santé. À l'échelle de tout le pays, des études épidémiologiques sont menées et devraient permettre d'ici quelques années de valider ces premières observations.

Mais pour le moment, et faute d'argent, le vaccin contre le paludisme est réservé à seulement 20 % des districts de santé. "On y travaille avec le gouvernement pour qu'il soit disponible au même titre que tous les autres vaccins, sur toute l'étendue du territoire, et pour tous les enfants", explique Linda Maiwanso, responsable régionale vaccination à l'Unicef. Car selon le ministère de la Santé, toutes les zones du pays et donc tous les enfants du Cameroun restent potentiellement exposés à la maladie.

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