Réalisation d'un sujet de JT : quel est le rôle du journaliste derrière la caméra ?
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Lorsqu'un sujet passe sur les antennes de France Télévisions, on entend le commentaire du journaliste qui a réalisé le sujet, on peut parfois même le voir passer à l'écran. Ce qu'on sait moins, c'est qu'il est systématiquement accompagné d'un journaliste reporter d'images (JRI) qui se tient derrière la caméra et est chargé de mettre tout ce travail en images. C'est ce qu'explique Florian Le Moal, lui-même JRI et grand reporter à France Télévisions, dans le cadre de notre rubrique transparence.
Un sujet se fait avec des mots... et des images
"Le journaliste reporter d'images (JRI), c’est celui qui donne à voir et à entendre, pour comprendre", explique Florian Le Moal. En télévision, un sujet ou un reportage se réalise en équipe. Une équipe de base est constituée d'un rédacteur ou d'une rédactrice, ainsi que d'une ou un journaliste reporter d'images. "La rédactrice ou le rédacteur va raconter l'histoire avec ses mots. Le journaliste reporter d'images va raconter cette histoire, cette même histoire, avec ses images. Et ensuite intervient le montage : c'est une troisième personne, le monteur ou la monteuse, qui va permettre de mettre en musique d'une certaine façon cette histoire qui contient déjà des mots et des images, pour que tout le monde puisse la comprendre."
Le temps de tournage comme seule contrainte
Les JRI sont-il libres dans la manière dont ils filment, dans les choix et les cadres qu’ils font ? "On a toute latitude, affirme Florian Le Moal, dès lors que nous ne sommes pas contraints, finalement, par une personne extérieure." En reportage, les journalistes de France Télévisions peuvent se retrouver confrontés au fait que certaines personnes ne souhaitent pas être filmées, ou bien refusent de les laisser filmer quelque chose qui les concerne. "Ces personnes-là peuvent essayer de nous contraindre, de nous empêcher de travailler. Tout l'enjeu pour nous, c'est de faire en sorte que l'on puisse tourner et raconter cette histoire," explique le JRI.
Du reste, les choix filmiques des JRI dépendent beaucoup du format auquel les images qu'ils filment se destinent. "Parce que lorsqu'on est journaliste reporter d'images à France Télévisions, on travaille pour différentes éditions, différents programmes," explique Florian Le Moal. Entre les éditions des journaux télévisés, sur France 2 et sur France 3, et les magazines comme Envoyé Spécial ou Complément d'Enquête : "Le temps, c'est une variable déterminante dans notre métier," insiste-t-il, en faisant référence à la fois au temps de tournage, et au temps d'antenne. "C’est-à-dire qu’entre un sujet qui va faire 1 minute 30 (pour un journal télévisé) et un sujet qui va faire 52 minutes (pour Complément d'Enquête), naturellement, on a plus de temps pour faire le second, et on a plus de temps pour raconter l'histoire. On passe d'1 minute 30 à 52 minutes. C'est cela qui fait que parfois, dans nos pratiques, on va tourner de manière différente."
"Pour le journal télévisé, on va tourner de manière plus efficace que pour un magazine"
Florian Le Moal, JRI à France Télévisionsfranceinfo
Par "plus efficace", le JRI entend qu’il faut être en capacité, très rapidement, en quelques plans, de raconter le plus fidèlement possible ce qui est en train de se passer.
"Si vous regardez un sujet de 1 minute 30, il n'y a pas énormément de plans finalement", explique Florian Le Moal. "On essaye d'être efficace : j'arrive dans un endroit, je regarde, je fais un plan large pour que les téléspectateurs soient en capacité de se repérer". S'il faut s'intéresser à une personne en particulier : "À ce moment-là, je me rapproche de la personne, je vais avoir un plan plus serré sur cette personne-là puisqu'elle va nous parler, etc."
Pour donner la parole aux gens, les journalistes de France Télévisions mobilisent un langage, un alphabet spécifique qui, dans le cas des JRI, passe par une richesse de plans : plan large, plan moyen, plan serré. Ensuite ils peuvent réaliser des séquences, c’est-à-dire suivre quelqu'un, dans ses actions ou ses explications. "À ce moment-là, on est caméra à l'épaule, on appuie sur le bouton, et on tourne, raconte Florian Le Moal. On tourne en continu la personne qui nous raconte son histoire, cela peut durer plusieurs minutes. Encore une fois, dans l'exercice du journal télévisé, on ne peut pas se permettre de tourner pendant des heures de telles séquences, là où nous aurons plus de latitude pour un magazine."
Au fond, tout est déterminé en fonction du temps dont dispose le JRI pour faire un reportage, du temps dont il dispose pour l'antenne, et des contraintes extérieures éventuelles de gens qui veulent ou ne veulent pas qu'il tourne.
Un travail d'équipe
Un JRI peut-il travailler seul ? Oui et non selon le grand reporter : "Je pense qu’on est dans un environnement qui change énormément, avec l’arrivée de nouvelles technologies. On voit bien qu'il y a de nouvelles générations qui sont arrivées, et qui sont en capacité avec leur smartphone de filmer, de raconter des histoires. Oui, dans l'absolu, une personne est en capacité avec les technologies d’aujourd’hui de raconter une histoire avec du son, de l'image, toute seule. Mais le journalisme c'est un travail d'équipe. Ce n'est pas une personne qui raconte une histoire.
"Je pense qu’on arrive à avoir un travail d'une plus grande qualité quand on est à plusieurs, qu'on échange, qu'on s'interroge sur la manière dont on travaille."
Florian Le Moal, JRI à France Télévisions
"Quand on est tout seul, poursuit-il, penser avec soi-même n’est pas le plus pertinent en particulier dans le journalisme, où notre métier est un engagement, une ambition, mais également une obligation par rapport aux téléspectateurs, celle d'être particulièrement rigoureux, parce qu'on sait très bien que le moindre écueil va mettre en doute et en question tout notre travail. Donc on doit être impérativement rigoureux. Quand on est une équipe on essaie de faire en sorte d'être le plus carré possible. C'est pour cela que je pense que travailler seul quand on fait du journalisme, ce n'est pas nécessairement la meilleure des aspirations, en tout cas en ce qui me concerne."
Regardez l'intégralité des explications de Florian Le Moal dans la vidéo ci-dessus.
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