Notre traitement de la réouverture de Notre-Dame de Paris et la situation en Syrie avec la médiatrice de Radio France

Le week-end dernier, deux événements occupaient l'antenne de franceinfo : la réouverture de Notre-Dame de Paris, et la chute du président syrien Bachar al-Assad. Des auditeurs questionnent la gestion simultanée de ces deux actualités, Notre-Dame et la Syrie.
Article rédigé par Emmanuelle Daviet
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7min
Vendredi 13 décembre 2024. Des syriens brûlent les drapeaux représentant le président Bachar al-Assad dans un square, au centre de Damas, pour célébrer la libération de leur peuple. (DIA IMAGES / GETTY IMAGES EUROPE)
Vendredi 13 décembre 2024. Des syriens brûlent les drapeaux représentant le président Bachar al-Assad dans un square, au centre de Damas, pour célébrer la libération de leur peuple. (DIA IMAGES / GETTY IMAGES EUROPE)

Les auditeurs nous ont écrit à propos du traitement éditorial de ces deux événements historiques du week-end dernier : la réouverture de Notre-Dame de Paris, devant un parterre de chefs d’État, et la chute du président syrien Bachar al-Assad, renversé après des années de guerre civile et de souffrances humaines sans précédent, un bouleversement majeur sur la scène internationale. Florent Guyotat, directeur adjoint de la rédaction est au micro d'Emmanuelle Daviet, médiatrice des antennes de Radio France.

Emmanuelle Daviet : Alors on commence avec Notre-Dame. Je vous lis le message d’un auditeur qui résume bien la teneur de ceux que nous avons reçus : "Vous consacrez une large part de votre antenne à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame. Que l’événement soit important, soit. Mais de là à lui laisser autant de place sur une chaîne de service public, je ne comprends pas. Beaucoup de Français ne sont ni croyants, ni catholiques, ni intéressés par l’événement. Alors pourquoi cette surmédiatisation ?"

Florent Guyotat, que répondez-vous à ces auditeurs ?

Florent Guyotat : Alors pourquoi une telle place ? Je pense que chacun peut convenir que la réouverture de Notre-Dame n’est pas simplement un événement religieux. Ça va bien au-delà. Au-delà de cet aspect, qu’on soit catholique ou pas, finalement, c’est la réouverture dans des principaux symboles du patrimoine français, qui a failli brûler il y a cinq ans. On rappelle que Notre-Dame, avant sa fermeture en 2019, c’était le monument le plus visité en France, plus, notamment, que le Sacré-Cœur à Montmartre ou la Tour Eiffel. 12 millions de visiteurs par an.

Paris, 11 décembre 2024. Messe pour les donateurs et les sponsors, donnée à Notre-Dame. Après cinq années de restauration, la cathédrale Notre-Dame de Paris a rouvert ses portes à tous les fidèles et visiteurs du monde. Avant l'incendie d'avril 2019, c’était le monument le plus visité en France, plus que le Sacré-Cœur à Montmartre ou la Tour Eiffel : 12 millions de visiteurs par an. (MARC PIASECKI / GETTY IMAGES EUROPE)
Paris, 11 décembre 2024. Messe pour les donateurs et les sponsors, donnée à Notre-Dame. Après cinq années de restauration, la cathédrale Notre-Dame de Paris a rouvert ses portes à tous les fidèles et visiteurs du monde. Avant l'incendie d'avril 2019, c’était le monument le plus visité en France, plus que le Sacré-Cœur à Montmartre ou la Tour Eiffel : 12 millions de visiteurs par an. (MARC PIASECKI / GETTY IMAGES EUROPE)

Donc je pense que tout ça dépasse le cadre religieux, d’autant qu’on n’a pas parlé que des événements purement liturgiques, comme les messes du dimanche sur franceinfo. Samedi dernier, il y avait aussi des enjeux diplomatiques, dont on a largement parlé avec nos spécialistes en direct du Parvis. Je vous rappelle que cette réouverture de la cathédrale a été l’occasion aussi d’une rencontre entre le président américain élu, Donald Trump, et le président ukrainien, Volodymyr Zelensky.

Rencontre que nous avons abondamment commentée, puisqu’on attend toujours de savoir précisément si Donald Trump, après son investiture, continuera d’aider l’Ukraine financièrement. Ce sont des enjeux cruciaux donc, qui dépassent le cadre religieux et qui méritent assurément une édition spéciale.

On poursuit avec une remarque qui concerne la gestion simultanée de ces deux actualités Notre-Dame et la Syrie. Un auditeur exprime sa déception sur la couverture des événements en Syrie dans la nuit du samedi 7 au dimanche 8 décembre. Il écrit : "La chute du régime Assad avec les scènes de liesse, les réfugiés syriens massés aux frontières pour rentrer chez eux. C’est un moment historique. Or, samedi soir, vous ne parliez pratiquement que de Notre-Dame. Vous ne pouvez pas à la fois déployer des moyens médiatiques exceptionnels, et tant mieux, pour suivre la réouverture de la cathédrale, et passer à côté d’un événement aussi historique. Nous avons commencé à entendre des interventions approfondies sur la Syrie dans la matinale de dimanche matin".

Florent Guyotat, quels ont été les défis éditoriaux à relever ?

Alors c’est vrai, samedi soir, nous avons encore très largement parlé de Notre-Dame de Paris, avec la diffusion, cette fois, de larges extraits du concert de réouverture avec nos journalistes sur place, Frédéric Carbonne, Thierry Fiorile, Matteu Maestracci. Mais nous évoquions aussi, c’est important pour cet auditeur, la situation en Syrie avec un récit factuel des villes syriennes qui tombaient une à une aux mains des rebelles.

Et nous avions d’ailleurs un expert en longueur à l’antenne, Fabrice Balanche, qui nous expliquait que la chute de Bachar al-Assad était inéluctable. Il nous disait que finalement, la question n’est pas de savoir si le régime va tomber, mais quand. Et justement dimanche matin, très tôt, lorsque nous avons eu la certitude que Damas, la capitale, était tombée, nous avons alors complètement bouleversé notre antenne. Édition spéciale dès 7h, toute la journée jusqu’à minuit, avec des témoignages des invités. Nous avons continué à évoquer les messes à Notre-Dame, mais beaucoup moins que ce qui était prévu à l’origine.

L’antenne a donc été très majoritairement consacrée à la Syrie, avec un détour par la cathédrale, à la fin de chaque demi-heure. Évidemment, vu l’événement majeur et d’ampleur, que constitue la chute de Bachar al-Assad, il était tout à fait normal de bouleverser nos programmes et de reléguer Notre-Dame au second plan.

Mais alors, précisément, par rapport à cette actualité, des auditeurs souhaiteraient savoir quels moyens sont déployés par la rédaction pour suivre les événements en Syrie ?

Nous avons déployé un dispositif vraiment très important sur le terrain. Dès dimanche soir, notre reporter Omar Ouahmane était à Damas, et nous livrait ses premiers récits. Et désormais, nous avons cinq envoyés spéciaux qui sont encore sur place, en Syrie, à l’heure où je vous parle. Tout cela, bien sûr, grâce à la force du groupe Radio France dont franceinfo fait partie.

Nous bénéficions aussi et merci à eux, de l’appui de nos collègues de la rédaction internationale de Radio France et de France Inter. Et c’est justement grâce à tout ce dispositif que vous avez pu entendre des reportages extrêmement marquants cette semaine, ça nous a tous marqués : des témoignages d’anciens détenus de la prison de Saidnaya, des témoignages d’exilés également, qui rentrent dans leur pays. Et puis des gens qui ont travaillé aussi pour le régime de Bachar al-Assad et qui eux, au contraire, tentent de fuir le pays.

Tous ces reportages, bien sûr nombreux et documentés, je vous invite à aller les réécouter si vous ne l’avez pas déjà fait sur franceinfo.fr.

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