: Infographies Droits de douane : trois graphiques pour visualiser l'ampleur du déficit commercial des Etats-Unis avec la Chine
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Une folle envolée. Depuis mardi 2 avril, les droits de douane flambent entre la Chine et les Etats-Unis. Ce jour-là, Donald Trump a annoncé une surtaxe de 34% sur les produits chinois, en plus des 10% déjà imposés sur les biens importés aux Etats-Unis, quel que soit leur pays d'origine. Mais le président américain n'en est pas resté là : la surtaxe est montée à 104% mercredi, puis 125% dans la même journée, avant d'atteindre un record de 145% jeudi. Pékin a riposté, coup pour coup, imposant à son tour des taxes à l'importation sur les produits américains : 34%, puis 84%, et enfin 125%, vendredi. La guerre commerciale entre les deux premières puissances économiques mondiales est bel et bien ouverte. Et ni Donald Trump, ni son homologue Xi Jinping, ne semblent prêts à céder ou à lâcher du lest. Pour les entreprises et les consommateurs, des deux côtés du Pacifique, les prix des produits concernés risquent d'exploser. Les conséquences pour ces deux économies étroitement liées pourraient être catastrophiques.
"L'époque où la Chine pillait l'Amérique est révolue", a affirmé mercredi sur X Stephen Miller, chef adjoint de cabinet de la Maison Blanche, après l'annonce de nouvelles surtaxes. Le président américain, fervent défenseur du protectionnisme, est obsédé par le déficit commercial abyssal des Etats-Unis vis-à-vis de la Chine. Il l'attribue à des pratiques qu'il juge déloyales, tirant les coûts de production chinois vers le bas. Il faut dire que la Chine reste l'usine du monde : ses capacités de production sont bien plus développées qu'aux Etats-Unis, où le niveau de vie plus élevé se traduit aussi par des coûts de fabrication bien plus importants.
Une balance commerciale qui penche du côté de Pékin
En 2023, la Chine a exporté vers les Etats-Unis pour près de 450 milliards de dollars (398 milliards d'euros), soit quasiment trois fois plus que ce que Washington a exporté vers Pékin. La guerre commerciale qui s'est engagée risque donc d'avoir des répercussions importantes des deux côtés du Pacifique. Pour les Etats-Unis d'abord, puisque de nombreux biens importés de Chine, désormais taxés lourdement, vont voir leur prix grimper. Mais aussi pour la Chine, qui envoie encore environ 20% de ses exportations vers le marché américain, d'après l'économiste Agatha Kratz interrogée par Le Figaro.
Premier fournisseur des Etats-Unis, la Chine occupe une place centrale dans plusieurs secteurs stratégiques de l'économie américaine. Et le déséquilibre commercial est flagrant : en 2023, Washington affichait un déficit de plus de 279 milliards de dollars dans les échanges de biens avec Pékin. Que ce soit avec les smartphones, l'électronique, le textile, mais aussi des composants industriels indispensables à de nombreuses industries, les entreprises chinoises inondent le marché américain. A l'inverse, pour les services, ce sont les Etats-Unis qui tirent leur épingle du jeu, avec un excédent de 26,6 milliards de dollars. Une large part de ces revenus provient des services éducatifs, principalement les frais de scolarité payés par les étudiants chinois inscrits dans les universités américaines, selon l'association US-China Business Council. Mais cet avantage reste insuffisant pour compenser le fossé creusé par les échanges de biens.
Des liens distendus depuis le premier mandat de Trump
Ce n'est pas la première fois que Pékin et Washington se livrent à une guerre commerciale. Dès 2018, lors du premier mandat de Donald Trump, les deux géants économiques avaient déjà instauré des droits de douane massifs de part et d'autre du Pacifique. En conséquence, les liens commerciaux entre les Etats-Unis et la Chine se sont peu à peu distendus. Pékin a renforcé ses échanges avec d'autres partenaires, notamment en Asie et en Europe. Dans le même temps, son excédent commercial s'est considérablement accru, notamment à cause du ralentissement de la demande intérieure chinoise, selon une note publiée en 2024 par des chercheurs du Fond monétaire international (FMI).
La Chine continue d'acheter beaucoup de produits agricoles aux Etats-Unis, comme le soja, mais les exportations américaines de cet aliment vers la Chine ont chuté de 38% entre 2015-2017 et 2018-2020, au profit d'autres pays producteurs, comme le Brésil. De leur côté, les Etats-Unis continuent certes d'accuser un déficit commercial important vis-à-vis de la Chine, mais cette part dans leur déficit global s'est nettement réduite depuis 2013. A l'époque, 68% du déficit commercial américain provenait de ses échanges avec le géant asiatique, contre seulement 32% en 2023, selon les données du représentant américain au commerce (USTR) et du Bureau d'analyse économique des Etats-Unis (BEA), consultées par franceinfo.
Si la part de la Chine dans le déficit commercial américain a reculé, ce n'est pas tellement parce que les Etats-Unis achètent moins de produits chinois : c'est surtout parce qu'ils en achètent davantage ailleurs. En parallèle, les exportations américaines vers la Chine ont progressé de 23% en dix ans, contribuant, un peu, à rééquilibrer la balance commerciale.
Mais selon des chercheurs du FMI, le déficit commercial des Etats-Unis, largement alimenté par la forte consommation des ménages américains, les plus riches du monde, n'est pas près de disparaître. La production locale ne suffit tout simplement pas à répondre à la demande des consommateurs, toujours plus friands de biens importés. Au-delà des seules relations avec la Chine, le déficit commercial global du pays a ainsi augmenté de 400 milliards de dollars en dix ans.
Donald Trump espère que ses droits de douane inciteront les entreprises à relocaliser leur production sur le sol américain. Mais un retour massif des usines aux Etats-Unis est loin d'être acquis. A titre d'exemple, des analystes de Wedbush cités par le magazine économique Fortune estiment que rapatrier ne serait-ce qu'1/10e de la chaîne d'approvisionnement d'Apple, dont 80% des appareils sont fabriqués en Chine selon une estimation d'un cabinet d'analyse, coûterait 30 milliards de dollars et prendrait au moins trois ans.
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