Homosexualité, violences sexuelles, écologie... Entre ouverture et conservatisme, le pape François confronté à douze ans de sujets de société
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"Ce matin à 7h35, l'évêque de Rome, François, est revenu à la maison du Père" : le pape François est mort lundi 21 avril 2025, à l'âge de 88 ans, a annoncé le Vatican dans un communiqué. Premier pape sud-américain, l'Argentin Jorge Mario Bergoglio avait été élu en mars 2013 après la démission de Benoit XVI.
Tout au long de ses douze ans de pontificat, il a plaidé sans relâche pour une église plus accessible et ouverte, à Rome, comme dans le reste du monde.
"Qui suis-je pour juger ?"
Comme ce 29 juillet 2013, soit un peu plus de 4 mois après son élection, dans l'avion qui le ramène du Brésil, son premier grand voyage, quand François répond aux journalistes à bord de son avion : "Si une personne est gay, cherche le Seigneur avec bonne volonté, qui suis-je pour la juger ?"
Cette phrase marquera le pontificat, rendant le pape plus populaire à l'extérieur qu'à l'intérieur de l'Eglise. François avait en effet l'image d'un progressiste, prêt à faire évoluer l'église sur les questions de société. Mais les changements, réels, ne sont pas si nombreux. Le dogme, lui, ne bouge pas : le catéchisme considère les actes homosexuels comme "intrinsèquement désordonnés", mais le pape encourage à plus d'écoute et de bienveillance.
Pour les fidèles homosexuels, cela se traduira en 2023 seulement : les bénédictions sont autorisées, mais dans un cadre très strict. Pour les divorcés remariés, l'accès à la communion leur est ouvert, mais au cas par cas. Et quand le mariage des prêtres est envisagé pour la région très particulière de l'Amazonie, François renonce.
Sur la lutte contre les violences sexuelles, dans le sillage de Benoît XVI, François facilite la libération de la parole, la dénonciation des agresseurs et reçoit des victimes au Vatican. Mais face aux scandales et révélations qui se multiplient, il peine à restaurer l'image de l'église, profondément atteinte.
Inflexibilité ou avancées limitées
Sur d'autres sujets comme l'avortement, le pape était inflexible. Et usait parfois d'un franc-parler qui pouvait heurter certains. "Est-il juste d'éliminer une vie humaine pour résoudre un problème ? Est-il juste de faire appel à un tueur à gage pour résoudre un problème ?". Des propos prononcés en Belgique en septembre 2024 qui ont provoqué une vive polémique, notamment outre-Quiévrain. Des centaines de personnes ont entamé des démarches de débaptisation, outrées par les propos du souverain pontife comparant les médecins qui pratiquent l'intervention volontaire de grossesse à des "sicari", un mot italien qui désigne en temps normal les tueurs à gages de la mafia.
François se montre également très rugueux sur ce qu'il appelle l"'idéologie du genre" : un "affreux danger", dénonce-t-il. Idem pour l'aide active à mourir, qu'il dénonce à Marseille en présence d'Emmanuel Macron, qui prépare alors le projet de loi sur la fin de vie. "Qui écoute les gémissements des personnes âgées, isolées, qui sont parquées dans la perspective faussement digne d'une mort douce, en réalité plus salée que les eaux de la mer ?", lançait-il lors de cette messe dans la cité phocéenne.
Enfin, sur la place des femmes dans l'Eglise, les avancées sont limitées. Mais, cette fois, les divisions internes étaient fortes : François devait composer avec une communauté catholique profondément fracturée sur tous ces thèmes. Quelques jours après le feu vert aux bénédictions de couples homosexuels, il confiait ceci à la télévision italienne : "Oui, c'est vrai, quand tu prends une décision, il y a un prix de solitude à payer".
L'Amazonie lui a ouvert les yeux sur l'écologie
Enfin, dernier trait marquant de son pontificat : l'importance accordée à l'écologie. S'il n'est pas le premier chef de l'Église à avoir abordé ces questions, il a donné une place centrale dans le message de l'Eglise. Et son équipe aimait à le souligner : il s'appelait François, comme François d'Assise, le saint catholique qui aimait la nature.
Ce pape fut ainsi le premier à consacrer une encyclique entièrement à l'environnement. Ce texte, Laudato Si, avec "sur la sauvegarde de la maison commune" comme sous-titre, a connu un retentissement mondial, à quelques mois seulement de la Cop de Paris, en 2015. François y décrit l'écologie comme un tout : les questions scientifiques, religieuses et sociales sont liées.
Au fil de son pontificat, le chef de l'Eglise catholique avait organisé au Vatican l'appel d'une quarantaine de personnalités religieuses et scientifiques, et convoqué deux fois les dirigeants des grands groupes énergétiques. Apôtre d'une transition radicale, plus proche de la décroissance que de l'adaptation technologique au changement climatique, François avait aussi consacré un synode à l'Amazonie, la région qui lui avait ouvert les yeux sur les ravages du phénomène.
Sous son impulsion, l'écologie est devenue un sujet de mobilisation pour une partie des catholiques."N'oublions pas que nous avons besoin d'une écologie intégrale. Nous devons écouter la souffrance de la planète en même temps que celle des pauvres", lançait-il aux Journées mondiales de la Jeunesse, de Lisbonne en août 2023. Quelques mois plus tard, l'Argentin devait être le premier pape à participer à une conférence internationale de lutte contre le dérèglement climatique, celle de Dubai. Ses forces déclinantes l'en avaient alors empêché.
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