Des pétales de rose pour lutter contre les effets du réchauffement climatique ?

En Turquie, comme en France et ailleurs, les lacs souffrent de la sécheresse au point de disparaître. À Burdur, dans le sud-ouest de l'Anatolie, des habitants tentent de sauver leur lac en cultivant la rose, beaucoup moins gourmande en eau que le maïs.
Article rédigé par franceinfo - Anne Andlauer
Radio France
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Temps de lecture : 3min
Flamants roses volant sur le lac Yarisli à Burdur, Turquie. Photo d'illustration. (TEMIZYUREK / E+)
Flamants roses volant sur le lac Yarisli à Burdur, Turquie. Photo d'illustration. (TEMIZYUREK / E+)

Le lac de Burdur est l'un des plus grands de Turquie, mais il est menacé. Il couvrait une superficie de plus de 230 kilomètres carrés dans les années 1980, contre 140 aujourd’hui. Ce n'est pas un cas unique. Selon un rapport de l’Association des politiques hydrauliques de 2020, 60% des 300 lacs recensés en Turquie, il y a un demi-siècle, ont déjà disparu.

Il pleut de moins en moins, il fait de plus en plus chaud. Mais les pratiques agricoles sont aussi en cause : des élevages et des cultures gourmands en eau, qui surexploitent les eaux souterraines dont se nourrissent les lacs et qui, au passage, les polluent.

Depuis une quinzaine d'années, des villageois de Burdur tentent d'inverser la tendance en agissant sur les pratiques agricoles. Concrètement, ils plantent des champs de roses à la place des champs de maïs. La culture de la rose nécessite beaucoup moins d'eau et l'idée est de mettre en place un arrosage au goutte-à-goutte, avec un tuyau au débit lent et régulier qui apporte l'eau directement au pied des plantations.

Une culture ancestrale et rentable

Öztürk Sarica, un vétérinaire de 55 ans qui a grandi sur les rives du lac de Burdur, s'est mis en tête, il y a 15 ans, de cultiver des roses directement autour du lac – en agriculture biologique – et d'encourager d'autres à le faire : "La rose consomme 75% moins d'eau que le maïs ou la luzerne, explique-t-il. C'est un bon argument pour relancer sa production, dans une région où on la cultive depuis environ deux siècles. Par ailleurs, la rose est une culture rentable."

"C'est une alternative intéressante à l'élevage de gros bétail qui se répandait dans la région. Aujourd'hui, la plupart des villages situés autour du lac cultivent la rose. En quinze ans, la production a augmenté d'environ 30%."

Öztürk Sarica, vétérinaire et cultivateur de roses

à franceinfo

Öztürk Sarica est depuis 15 ans à la tête du projet Lisinia Doga – un projet plus vaste de préservation de la nature dans cette région. Il estime que le travail d'information, de sensibilisation porte ses fruits. Dans tout le bassin autour du lac, "l'irrigation sauvage", par inondation, a quasiment disparu, selon lui. Ce qui, observe Öztürk Sarica, ne peut qu'avoir des effets positifs sur le lac, même s'il est difficile de les mesurer précisément.

Un lac qui se porte mieux

Par ailleurs, la rose est devenue une source de revenus importante pour la région. L'huile de rose produite localement se vend actuellement autour de 12 euros le kilo. Elle est presque intégralement destinée à l'exportation, notamment en France. Il y a une forte demande mondiale, en particulier des secteurs de la cosmétique et de l'aromathérapie, dont profitent les agriculteurs de Burdur et avec eux, le lac de Burdur.

Dans l'ensemble, c'est donc une expérience positive, même si Öztürk Sarica souligne que les producteurs de rose souffrent eux aussi des effets du réchauffement climatique, avec des roses qui fleurissent plus tôt et des récoltes moins abondantes. Ce qui, précise-t-il tout de suite, ne l'empêchera pas de continuer.

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