: Reportage "Ça fait 34 ans qu’on cherche nos maris et nos enfants" : au Congrès mondial sur les disparitions forcées, des familles réclament "vérité" et "justice"
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Des témoignages qui tranchent avec le côté protocolaire. Le 15 et 16 janvier, lors du premier Congrès mondial sur les disparitions forcées, à Genève, des familles de victimes venues de Mauritanie, du Mexique ou du Sahara occidental ont manifesté leur tristesse et leur colère au milieu de la cérémonie d’ouverture.
Lors de la cérémonie d’ouverture, des familles de disparus ont scandé "vérité" et "justice", alors que les intervenants officiels se succédaient derrière le pupitre du Centre International de Conférence de Genève. Des manifestations qui se sont terminées, à chaque fois, sous les applaudissements d'une salle acquise à la cause et le regard bienveillant d'Olivier de Frouville, le modérateur de la cérémonie, également président du Comité des disparitions forcées à l'Onu, comme franceinfo a pu le constater.
Selon l'Organisation des Nations Unies, on parle de disparition forcée pour l’arrestation, la détention, ou l’enlèvement commis par des agents de l’État ou par des personnes qui agissent avec son autorisation. L'une des caractéristiques de ces disparitions est le déni total du gouvernement et l'absence d'informations quant au sort réservé aux victimes. Celles-ci peuvent être emprisonnées, torturées ou même avoir déjà été exécutées. Une situation très difficile pour les proches des disparus.
"On sera là jusqu'à notre dernier souffle"
Les familles de victimes ont parcouru des milliers kilomètres pour participer à ce congrès ouvert à tous. "D'être ici, à Genève, c'est une grande responsabilité pour faire entendre les voix des 160 000 personnes disparues dans mon pays", explique Viviana, venue du Mexique et qui recherche son frère depuis sept ans.
"Cela fait 34 ans qu'on cherche nos maris" confie Koumba, qui n'est pas dupe sur son statut de veuve. Elle fait partie d'un groupe de femmes mauritaniennes qui a aussi fait le déplacement jusqu'en Suisse. Avec un souhait, un espoir : "On demande juste une enquête et un jugement". Même détermination pour Kardiata qui, pour connaître la vérité, "sera là jusqu'à son dernier souffle".
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Même si le terme de disparitions forcées est encore peu connu, sa réalité, elle, est chiffrée. Pendant la guerre civile algérienne de 1992 à 1997, on dénombre entre 6 000 et 17 000 disparitions. En Argentine, 30 000 personnes disparaissent rien que sous le régime de la junte militaire de 1976 à 1983 et 100 000 personnes sont exécutées de 1936 à 1975 pendant la guerre d'Espagne et le régime de Franco. Et c'est bien sûr encore le cas aujourd'hui, partout à travers le monde. "La Syrie, c'est plus de 100 000 disparitions forcées qui touchent 10 millions de familles", explique le militant syrien pour les droits de l'homme Taher Hijazi.
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"Un outil de répression pour mater la contestation"
Ce premier congrès, dont la France était partenaire, a réuni tous les acteurs engagés sur le sujet, dont Solange Moumé Etia, la directrice du pôle Programmes et plaidoyer de l'association ACAT-France, investie depuis plus de 50 ans sur ces questions. "C'est très difficile à quantifier, mais on estime à des millions le nombre de disparitions forcées. Il s'agit d'un outil de répression pour mater la contestation des citoyens qui luttent pour l'établissement d'un État de droit ou le respect des libertés fondamentales comme la liberté d'expression, de manifester ou encore la liberté d'exercer la profession de journaliste...", détaille-t-elle.
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Ce congrès a aussi pour vocation d'inciter le plus de pays à s'engager. Un de ces moyens est de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée en 2006 par l'ONU et dont la France et l'Argentine sont à l'initiative. Pour l'instant 77 pays l'ont ratifié et l'objectif pour 2025 est de passer à 100 Etats-parties.
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