Brésil : cinq ans après le début de l'épidémie de Covid, le pays est toujours meurtri

Le Brésil est le deuxième état le plus endeuillé au monde par le Covid-19. En 2025, la mémoire des victimes est encore vive et le virus sévit toujours.
Article rédigé par franceinfo - Jean-Mathieu Albertini
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une vue aérienne du site funéraire réservé aux victimes du Covid au cimetière Nossa Senhora Aparecida à Manaus, au Brésil, le 21 novembre 2020. (MICHAEL DANTAS / AFP)
Une vue aérienne du site funéraire réservé aux victimes du Covid au cimetière Nossa Senhora Aparecida à Manaus, au Brésil, le 21 novembre 2020. (MICHAEL DANTAS / AFP)

Il y a cinq ans, l'épidémie de Covid-19 déferlait sur le monde. Rapidement atteint, le Brésil a été, avec ses 714 000 victimes, le deuxième pays le plus touché en nombre total, notamment à cause des outrances et de la politique négationniste menée par Jair Bolsonaro. Aujourd'hui, le virus continue de tuer : 6 000 personnes en 2024, un chiffre largement en baisse par rapport à l'an passé, mais le Covid menace toujours les plus vulnérables, alors que le pays tente d'apprendre des erreurs du passé.

Au cœur de l'immense complexe de favelas da Maré, Valdirene Militão a le cœur serré. Les années passent, mais ne suffisent pas à lui faire oublier la douleur des deuils en série. "Tous les jours, j'apprenais que quelqu'un venait de mourir. Une fois, cinq voisins sont morts en une seule journée, se souvient-il. Mais le moment le plus difficile fut d'apprendre la mort de mon beau-frère, puis celle de ma meilleure amie."

Un projet de mémorial en hommage aux victimes retardé

Ni le chagrin de Valdirene Militão, ni la moiteur estivale ne bride l'animation des rues de la favela. Dans l'une d'elles, un mur de faïence, construit à l'initiative de l'ONG Redes da Maré en 2021, rend hommage aux victimes locales de la Covid-19. Valdirene Militão souligne l'importance de se souvenir : "Si on ne se rappelle pas de notre passé, on n'a pas de futur. Un moment, on a eu des fous au pouvoir qui nous disaient de ne pas se vacciner ! C'est pour ça que c'est très important de construire ce nouveau mémorial." En effet, un autre monument, plus imposant et pour toutes les victimes de la Covid doit voir le jour le long de l'immense avenue qui borde la favela. Mais malgré la participation des habitants, et cette fois le soutien de l'État, le projet a pris beaucoup de retard.

Douglas Oliveira, lui, est sûr que son poème va se retrouver à un moment ou à un autre sur ce monument. Avec l'ONG Redes da Maré, Douglas Oliveira a largement mis la main à la pâte durant la pandémie. Il retient le travail d'entraide au sein de la communauté. "Même si c'était un défi totalement nouveau pour l'humanité, on a fait ce qu'on a toujours fait dans la favela, c'est-à-dire essayer de trouver des solutions à des problèmes qui s'imposent à nous, dit-il. En cas de nouvelle pandémie, je pense qu'on aura maintenant une bonne base pour apporter des solutions inventives."

Des problèmes de distribution de vaccins persistent

De l'expérience, mais aussi des technologies plus efficaces et moins chères pour surveiller les virus, c'est ce qui permet à Pablo Ramos, professeur à la Fiocruz, un institut de recherche lié au gouvernement, d'affirmer que le pays est désormais mieux préparé. "Au-delà des tragédies, tous les grands événements sanitaires apportent leur lot de leçons et de réflexions, constate le professeur. On développe par exemple un système capable d'anticiper de trois à quatre semaines de nouvelles épidémies de syndrome respiratoire, grâce à l'analyse hebdomadaire d'une immense base de données qui recense les millions de consultations médicales dans tout le pays."

Cependant, malgré la volonté affichée du gouvernement de Luiz Inacio Lula da Silva de prendre au sérieux les menaces sanitaires, des problèmes de distribution de vaccins persistent. Surtout, le pays n'a toujours pas de législation spécifique en cas de nouvelle crise sanitaire et reste donc à la merci des tendances politiques.

Lancez la conversation

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.